13 min 30 _ avril 2009
partiellement muet
coul. _ mini-dv
filmé à Catania en février 2008
3ème vidéographie de Sicile
[13èmes Rencontres Traverse Vidéo, Toulouse, Centre Culturel Bellegarde, mars 2010
19ème festival Côté Court, Ciné 104, Pantin, juin 2010]
Nuit du 16 au 17 février 2010
L’errance, la défaillance du point d’ancrage quand “je” filme la surface de l’eau, quand “je” perds les poissons. Les soubresauts de la quête inquiète croisent soudain la mise en route d’un moteur, plus proche, au sein du jardin, son qui se distingue des moteurs ambiants et routiers, via Etnea — le jardin botanique est pris dans les circulations folles de Catane, île aspirant au calme dans une tempête de moteurs & de voix brusques — la rue qui, montant vers le volcan invisible, à son sommet, est au summum de la cacophonie, rejoignant d’autres voies routières & le Circumetnea (le train circulant autour du volcan). Le bassin aspire au calme, à la rêverie métaphysique : trouver quelque chose au delà de la confusion, une issue à l’angoisse, passant par elle tout de même ; traversée difficile, épreuve. Accepter de se perdre dans l’errance du filmage avec cette foi que du déséquilibre peut naître autre chose.
L’ennui auquel j’étais confrontée à Catane, ce malaise éprouvé dans la perte de mes repères, dans la bousculade de ce réel là, cet ennui — “Qu’est-ce que je fais là ? Qu’est-ce que je fabrique dans cette ville, au pied du volcan que je désirais tant et que je ne vois même pas ? — cet ennui cachait, masquait une forme profonde en mutation, une métamorphose, une forme en biais, qui s’opérait à l’intérieur de moi & au cœur de l’image. Chercher un “je-ne-sais-quoi” en mouvement, la petite panique à la surface de l’eau où tout est sombre pour un moment, et le dénouement surgit avec le moteur qui sourd, s’essaie, qui embraye et s’amplifie. “Je” finis (commence) par suivre son rythme, le bruit de ce moteur dicte mon filmage et l’œil-caméra tombe sur les taches rouges des poissons qu’il avait perdues. Avec le son, il suit les gestes respiratoires, les flottements dans les reflets de ces formes oblongues dans les eaux noires.
Le dernier tableau-vidéo, muet à dominance verte, vient résoudre l’enjeu vidéographique du voir, vient dénouer l’angoisse blottie dans l’ennui par un geste brusque qui distord l’image, la porte à son sommet baroque — et “je” rejoins le petit tronçon de rue, un peu plus haut, trouvée avec joie : via Empedocle.
S.T.
— Synopsis 1 : Que se passe-t-il à contempler la surface d'un bassin ? Événements optiques & synchronie sonore dans le jardin botanique
de Catane (Sicile), ville nerveuse au pied de l'Etna.
— Synopsis 2 : Tableau-vidéo baroque où l'on fait l'expérience de se perdre dans l'errance du filmage (la surface d'un bassin) avec cette foi que du déséquilibre peut naître autre chose.
Dispositif de visionnage : sur écran plasma 4:3 doté de bonnes enceintes, ou en projection en salle de cinéma.
"Et il suffirait d'un rien pour que cette fièvre légère, insistante, presque agréable se métamorphose en ivresse —celle, baroque, de l'acceptation de la mort, de la connaissance panique—, mais quelque orgueil ausitôt se cabre, un temps d'orage a commencé en Europe, un de ces temps de ciel noir où passent quelquefois de scintillantes lumières (romantisme)."
Yves Bonnefoy in "ROME, 1630", à propos des Bambochades (peintures de scènes réalistes brossées rapidement que pratiquaient les peintres à Rome).