17 min _ II-2010 coul. _ 4:3 _ mini-dv partiellement muet filmé à Capri en fév. 2008
Prisonnière dans le village de Capri, j'ai erré et me suis retrouvée nez à nez avec la villa du Mépris, Villa Malaparte. Je me suis alors laissée guider par le lieu pour la filmer. Signe face à la mer, de l'architecture à la côte du Vésuve, maquette vide dans la nature, Villa M. se termine par un plan où le paysage offre son cinéma…
Une fenêtre, avec ses deux vitres et son montant pvc, quoi de plus familier ? Mais devenue l’instrument de la réflexivité du soleil, elle acquiert merveilleux, devient image-tableau, étrange. La lumière exhibe son propre code par la vitre-miroir filmée qui répond à ses jeux — transformation de la tache solaire, sa déformation, son dédoublement ; dilution du point lumineux ; éblouissement ; sa dissolution ; diffusion aqueuse ou aérienne ; omniprésence jusqu’à l’anéantissement de sa visibilité dans l’espace : la lumière s’échappe du cadre.
L’énergie lumineuse et de passage, traces du soleil hivernal & hors champ, sur les vitres, surface inframince, interface filmée de biais. Maintient du regard tendu vers ce verre-tableau aux éclats & aux aplats lumineux se colorant-décolorant.
Paysage du temps (hiver).
Pellicule photosensible inscription à la verticale — stèle
évanescence au point de fuite hémorragie lumineuse de la tavola — diptyque-vitres-miroir
éclate, se répand, se diffuse, disparaît dans l’effacement, se transforme comme un fluide absorbée — tache d’huile
Memento lumen — Souviens-toi de la lumière
La lumière comme signe : lumen
Défaillance : la lumière se meurt filmée en oblique, de biais
Index : filmer comme le doigt indexe, indique, montre désigne la lumière, son reflet l’œil-caméra reçoit autant qu’il désigne
Maintenir le doigt pointé sur cette grande double-page miroir lumière défaillante.
« "Le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement", LA ROCHEFOUCAULD, seulement les traces de leur déplacement, les traces de leur effacement… » Louis MARIN, Visibilité, « Le tombeau du sujet en peinture » in « De la représentation ».
Comment la lumière serait-elle figurable ? C’est son effet qui l’est. La lumière excède le lieu, le support, elle est espace, diffusion d’elle-même dans l’espace, elle métamorphose les limites de l’espace, en défigure les bords, les supports, elle modèle l’espace.
Lumière recueillie, absorbée par la surface miroirique, reflétée, puis désignée (déformation du signe).
Lumière enchâssée lumière désignée
Elle consume l’image, le temps l’épuise. La lumière ne s’épuise pas.
Mise en lumière d’une surface miroirique (tautologie), mise en lumière d’un manque, vide au centre de la spirale.
Lumière n’est pas vide elle enveloppe.
« opacification du sens et du voir jusqu’à l’indécidable, un point de vertige et d’abîme » * au sein de la lumière
[* p 150 « La folie du voir – de l’esthétique baroque » ch. « La longue-vue rhétoricienne : Il mirabile, il furore » Christine BUCI-GLUCKSMANN ]
La lumière s’annule annule le point de fuite, dans son évanescence
Figure renversée de la lumière : en miroir, elle s’anéantit dans lui, dans l’image, son sens est usé dans la durée du filmage. Elle est infigurable.
Rhétorique muette : filmer le principe de la lumière se réfléchissant, elle s’anéantit alors qu’elle se donne comme visible jusqu’à saturation, jusqu’à l’excès. Elle emplit, pour finir, toute l’image excède le cadre de la fenêtre, éclaire le mur de brique omniprésente, absence de sens, absence de direction du sens plus de trajectoire plus de projection d’elle-même, elle se diffuse dans l’espace le tableau n’a plus lieu d’être alors je cesse de filmer.
Articles, journal de bord concernant le processus de mon travail en vidéographie dont vous pourrez visionner ici des extraits (10 min maxi). Je m'attache en filmant "sur le vif" à pénétrer dans l'intimité du lieu ou de l'objet. À donner forme à une perception insoupçonnée avant d'avoir cherché l'infime. Le dispositif de visionnage en ligne ne sert pas au mieux ce travail filmé en dv. La projection sur écran cinéma avec le son qui enveloppe le spectateur, confortablement assis, ou diffusé sur écran plat LCD doté de bonnes enceintes, restent ses meilleurs modes d'appréhension. Sur les petits lecteurs Youtube vous pourrez tout de même entrer dans une durée, celle de l'expérience du filmage : comment le son et l'image sont amenés, leurs rapports. Les arrêts sur image, quant à eux, sont représentatifs de la qualité de l'image d'origine. Ajouter que le titre général de ce blog prend sa source dans ma lecture de « Machina memorialis—Méditation, rhétorique et fabrication des images au Moyen Âge— » de Mary Carruthers (éd. Gallimard, Nrf, 2002, trad. Fabienne Durand-Bogaert).
Née en 1974 à Orléans. Diplômée des Beaux-Arts de Bourges (1995) puis de Lyon (1999). Formation typographique & pao à l'Imprimerie Nationale (2001). Porte 34 est son lieu de vie et de travail (écriture, photographie & vidéographie), rue Étienne Marey, Paris 20e de 2002 à 2009.
Correspondances : 1998-2005 avec l'éditeur & commissaire d'exposition Johannes Gachnang. - 2006-2008 avec l'écrivain Pascal Quignard. - 2002-2004 Assistante de l'artiste vidéaste Joël Bartoloméo. - 2004 Voyage à Naples : Carnet de voyage photos mailé. - 2005 Performance à Marseille, exposition à La Friche La Belle de Mai, avec Les Instants Vidéo. - 2006 Commence ses productions en
vidéographie diffusés par Les Instants vidéo, Côté Court et Traverse Vidéo - 2008 : Naissance du blog MACHINA PERCEPTIONIS - 2010-2011, travaille le rapport de la vidéographie avec la musique contemporaine - VII 2012 : Création de l'entreprise GRAPHISMISENPAGE I-2013 : Création du blog LA VAILLANTE